Lobpön Gangri Kunzang Dorjé naquit en 1919 à Dri Ji, la communauté qui était sous Dri-ra Phoug et Jiwou Gonpa, au nord du Mont Kailash, dans la région de Ngari au Tibet. Il était le cinquième des sept enfants nés chez Kardar et Sichoe Dreulma. 

À 9 ans, son père mourut et il prit la responsabilité de la famille jusqu’à l’âge de 25 ans. Puis il renonça à la vie mondaine et suivit la voie secrète d’un yogi de la lignée Drukpa. Il étudia les rituels et pratiqua la voie des Ngöndro pendant plus de cinq ans au monastère de Dri-ra Phoug, le lieu sacré de Gyalwa Gotsangpa de la lignée Drukpa.   

À son retour au monastère, il rencontra un lama du Kham, Tibet oriental, qui lui dit que d’aller en pèlerinage est une action vertueuse au niveau mondain mais que pour réaliser la nature de l’esprit, on a besoin des conseils d’un maître réalisé. Aussi demanda t-il au lama si un tel maître pouvait être trouvé dans la région. Le lama répondit, « Ne savez-vous pas que Thripeun Péma Chogyal, un disciple de Shakya Shri et le détenteur des enseignements de toute la lignée Drukpa donne des enseignements à Tsibri Niou Tuèng ? » 

Juste entendre le nom de Thripeun Rinpoché lui fit oublier brièvement tous les sentiments mondains. Décidé à poursuivre une véritable voie spirituelle, il partit pour Tsibri at l’âge de 27 ans, sans prévenir ses compagnons et ses proches. Il reçut les enseignements de la tradition Drukpa, les quatre fondements de Jampa Rinpoché et accomplit deux fois la pratique. En 1947, à l’âge de 29 ans il rencontra Thripeun Péma Chogyal Rinpoché et fit la requète pour devenir son disciple.

Après avoir reçu toutes les transmissions, initiations et enseignements de la lignée Drukpa de Thripeun Rinpoché, Lobpön Gangri passa 14 ans au centre de retraite à Nirang. Bien qu’il voulût passer sa vie complète en retraite, les bouleversements de 1959 au Tibet l’obligèrent à sortir de retraite et à s’enfuir en Inde, emportant seulement des textes spirituels avec lui. 

Après avoir passé deux mois dans une grotte à Waloung, il vint à Kalimpong pour recevoir les initiations de la tradition Nyingma de Sa Sainteté Dudjom Rinpoché. Là il rencontra Dromo Kargyud Tulkou qui organisa le séjour de Lobpeun Gangri dans une hutte dans la forêt reculée à Rinag, au Sikkim. Il fit six ans de retraite solitaire et plus de trente ans de semi-retraite au même lieu, demeurant dans la réalisation du Mahamoudra sans aucune obscuration mondaine d’aucune sorte. J’ai osé lui demander de demeurer dans le centre de retraite de Naropa à Darjeeling et de nous conduire tous avec son éveil, mais évidemment il n’accepta pas notre requête qui aurait interrompu sa retraite. De même il refusa la requête du 16ème Karmapa consistant à être le maître de son centre de retraite. 

« Je voudrais avoir une bonne douche demain matin très tôt et nous deux nous devrions célébrer une grande matinée après cela », dit mon Gourou à l’un de mes amis du dharma, qui était assez fortuné pour le servir, et il sourit pour un instant. Le matin du jour suivant, qui était le 20 août 1990, dès qu’il eut fini sa session formelle de méditation matinale, il prit une longue douche et s’habilla proprement et élégamment, s’assit en posture de méditation et prononça « AH » (la syllabe du Mahamoudra) trois fois avant de se dissoudre dans le Nirmanakaya. Cet état de méditation de l’esprit demeura environ une semaine dans son corps qui était parfaitement en posture de méditation avec un visage au sourire radieux. Sa méditation s’était unie à la grande compassion.    

Il fut l’un de mes maîtres du Mahamoudra ; de lui j’ai reçu les enseignements uniques de meditation. À l’inverse de nous, il n’avait pas l’habitude d’avoir un texte pour enseigner. Ses enseignements étaient purement la manifestation immédiate de la réalisation. Malheureusement, pas beaucoup de personnes dans ce monde n’eurent l’opportunité en or de recevoir ses enseignements. Quelle perte ! Il y a peut-être beaucoup de raisons, mais la principale à laquelle je peux penser est que nous sommes très occupés à chercher un Gourou fameux. Merci à mon propre Karma et au précieux conseil de mon premier maître, Thuksey Rinpoché, j’ai eu l’esprit de demander ses enseignements en cette vie.